Génie des lettres et de mots, inconditionnel de Napoléon, amoureux de la France ; l’excellent Mark Tinkovitch aura marqué la deuxième édition du BWS. D’abord circonspect face à la tortueuse Union Européenne, il a fini par incarner avec brio la France au Conseil. Passionné d’histoire, de relations internationales et de stratégies bien ficelées, le BWS était fait pour lui.
Porter la toque française
Franco-Russe à la carrure imposante, Mark Tinkovitch ne recule devant rien, surtout pas devant l’usage de la rhétorique. Audacieux, impétueux et malin, il a imposé sa patte dans les négociations, parfois houleuses, du BWS. Citations d’illustres personnages et verbe aiguisé à l’appui, Mark a su tirer son épingle du jeu en portant haut son idée de la France. Aujourd’hui en Master 2 relations internationales à Sciences Po Aix, il livre ses meilleures anecdotes et conseils à la nouvelle génération de joueurs et joueuses. Arrivé en Master 1 expertise en relations internationales après un bac L, deux ans de classes prépas littéraires et un Master en Histoire et civilisations, il n’a pas toujours été féru d’Europe. “L’UE me faisait l’effet d’une nébuleuse technocratique. Clémenceau affirmait que “pour gouverner, il faut un nombre impair et trois, c’est déjà trop”, alors gouverner à 27…” ironise-t-il. Toutefois intéressé par les relations internationales, “surement par ma double nationalité”, il s’est catapulté aux portes du BWS. “J’étais intrigué par l’aspect simulation proposé par le BWS, les cours suivis auprès de M. Aldrin et l’engouement de la promo ont fini par me convaincre” se souvient-il, nostalgique. Porté par ses projets professionnels, “dans la diplomatie ou dans le privé pour un rapprochement franco-russe”, et par son goût du défi, le stratège a très vite su tisser ses alliances. Celui pour qui il était “évident de porter la toque française” pour son “attachement à la culture et à l’histoire du pays”, s’est très vite rapproché du parlement et des lobbys. “On a tissé des alliances et des stratégies très complexes pour avoir un coup d’avance sur les autres et faire de l’Europe un levier d’Archimède pour la puissance française, comme le voulait De Gaulle” rapporte le joueur exalté. Outre les jeux d’alliances et les coups de pression en négociation, Mark Tinkovitch retire beaucoup de son expérience.
Diplomatie, cernes et sang-froid
Mise à part “de grosses cernes”, le BWS “apporte une meilleure connaissance des rouages du système européen. Il n’y a rien de mieux que la pratique pour maîtriser à fond les rôles des organes de l’Union, et on en ressort vraiment grandi” indique l’ancien participant. Frappé par “le réalisme de l’immersion”, Mark rapporte avoir pu saisir les enjeux des plans européens, des alliances entre la presse, les institutions ou encore la place des États dans la machinerie de l’Union. “Je suis reconnaissant de cette expérience, encore aujourd’hui ça m’est d’une utilité extraordinaire. Par exemple, les discussions autour du plan de relance, tout cela m’est clair, aisé à comprendre, et ça m’arrive d’expliquer les enjeux à des amis qui ne sont pas familiers avec les structures de l’UE !” se réjouit le futur diplômé. Il a par ailleurs été distingué au terme des plénières d’un prix d’honneur, le diplôme du joueur le plus sérieux de ce serious game, pour avoir la fâcheuse tendance de transporter ses fiches stratégies partout, même lors de rencontres informelles, “au cas-où”. Fin négociateur, il se souvient de ses nuits blanches au côté des membres du Conseil, à la veille de la plénière. “La diplomatie pouvait se faire à un rythme marathonien, nécessitant beaucoup de mental et de sang-froid. J’ai adoré cet aspect. Il fallait dialoguer avec tous les autres pays, garder son calme quand surgissait le moindre “ oui mais non “, répondre avec douceur à la moindre contradiction”, explique-t-il.
“Faire bouger les lignes”
Taquin et provocateur quand il le faut, Mark Tinkovitch a aimé pouvoir “faire bouger les lignes”, n’hésitant pas à “gronder et sonner le ban pour que l’UE puisse bouger, tout en suivant la torche française”. Cherchant parfois le conflit, il concède que s’il devait renouveler l’expérience, il afficherai “plus de solennité”. “La France, c’est peut-être le rire de Molière, la légèreté de Beaumarchais ou encore le scandale du marquis de Sade, mais c’est aussi la rumeur attristée d’Agrippa d’Aubigné, la mélancolie de Joachim du Bellay et le timbre grave de Mitterrand” avance le littéraire. Tantôt sérieux, tantôt badin, l’ancien joueur ne saurait que trop peu conseiller à la nouvelle génération de “s’amuser et d’oser se lâcher, d’être sarcastiques, subversifs, provocateurs, audacieux”.
Elhia Pascal-Heilmann